Éditorial #4

La période est propice, Fiction et son équipe vous présentent leurs meilleurs vœux pour l’année 2023.

Nouvel an, mais aucune nouvelle résolution, nous conservons celle qui nous guide depuis le commencement sans date particulière : offrir un bon contenu dans un environnement bien fait, c’est-à-dire des nouvelles, en majeure partie francophones et inédites, et des articles originaux, exposés dans un cadre graphique et typographique soigné.

FICTION #4 inaugure cependant le bel ajout des rabats à la couverture, et demeure en couleur avec un prix de vente à peine augmenté de quarante centimes. Un tour de force qui nous étonne presque lorsqu’on se souvient de l’escalade rapide des prix pour un peu tout et n’importe quoi depuis plusieurs mois. Malgré la relocalisation en France de l’impression, désormais effectuée par un imprimeur de Bordeaux, certifié Imprim’Vert de surcroît, nous espérons maintenir ce prix pour les deux prochains numéros, il sera en tout cas certifié pour les souscripteurs à l’année jusqu’au printemps. Un argument non négligeable qui devrait vous encourager à souscrire sans tarder.

Peut-être la date est également propice à rappeler quelques faits à propos de Fiction. Un prozine possède les qualités d’un objet réalisé par des professionnels, mais il a du fanzine le dévouement de passionnés. Chacun des contributeurs apporte sa pierre, l’une un texte, l’autre une illustration, et l’autre encore sa compétence, nos lecteurs et lectrices, pour leur part, contribuent à l’impression et l’expédition de notre objet, un magazine papier. S’il existait un bénéfice – qui reste à naître à ce jour, hélas – il serait immédiatement reversé dans l’amélioration de Fiction, par exemple pour acheter une traduction ou des droits étrangers, car nous ne pensons pas exclusivement « national » même si nous estimons que la nouvelle francophone est belle et qu’elle a besoin d’un tremplin attentif. Un argument non négligeable destiné à vous encourager à nous accompagner dans notre démarche.

Rompons là avec les détails ennuyeux et venons-en au sommaire de Fiction, l’imaginaire radical #4 !

Certains déclarent que la diversité nuit à la souche… nous n’en faisons pas partie, radical parle de racines vivantes de l’imaginaire, pas d’un tronc coupé et cadré dans une photographie triste de la culture. Justement, ce sommaire vous propose un nuancier de talents. Premier texte publié ou le suivant d’une riche bibliographie, chaque nouvelle est un nouvel horizon de l’imaginaire.

Dans l’ordre d’apparition : après ses romans Le camphrier dans la ville flottante et Warhol Invaders, Nicolas Labarre investigue toujours plus loin dans le domaine des médias dématérialisés, cette fois en Corée, lors de la finale du jeu mondial dans le futur peut-être plus proche que vous ne le pensez de « Face à la mer d’acier ». Sonia Quémener n’hésite pas à aborder l’avenir de nos bibliothèques au cours d’un étonnant récit, « L’espèce qui raconte des histoires », lequel rappellera peut-être aux amateurs Margaret St Clair, nouvelliste souvent publiée dans Fiction de chez Opta, avec une manière similaire de détourner radicalement la réalité en lui octroyant une consistance aussi pragmatique qu’un quotidien. La masse du kaijū domine «  Dorsale » de Raphaël Fazi – souvenez-vous de Godzilla ! –, mais la créature a davantage à nous apprendre qu’à détruire, dans ce monde de demain, lorsqu’un vieil homme et une adolescente ont le courage de l’écouter. En compagnie de Timothée Rey, on emprunte le cheminement de « Glumgorr, barbare organisé » grâce à son carnet de voyage, une brillante fantaisie de fantasy qui ne manque pas de susciter irrépressiblement le sourire, et qui ravira les fans des recueils Dans la forêt des astres & Des Nouvelles du Tibbar. Dans « Le Sang » résolument, Sushina Lagouje met en scène un duo de vampires en temps de covid, deux terrifiantes charmeuses à crocs capables du pire avec toute la joie dévastatrice de leur créatrice. Pour Nicolas de Torsiac, la Commune n’a pas subi seulement les versaillais, un épisode secret du « Club des gentilshommes peu ordinaires » révèle une autre bataille plus sournoise encore entre des puissances occultes dont les armées possèdent des talents plus qu’humains. Les deux derniers textes sont de Henri Barbusse, une présence inattendue et pourtant pertinente grâce à ses contes excessifs extrait du journal Le Matin, « Hallali » et « Leur chemin ».

Henri Barbusse nous entraîne aussi dans la partie rédactionnelle de Fiction, car Jean-Luc Buard en fait le sujet passionnant de sa « Question de genre », toujours à l’affût de la frange de l’imaginaire, de l’invisible dans notre secteur trop balisé. André-François Ruaud flâne parmi ses lectures afin d’introduire dans les esprits des titres « Pour s’envoyer en l’air le regard » qui leur auraient échappé. Grâce aux « Apostilles », inspirées par Umberto Eco, lectures encore, mais de parutions déclarées du genre qu’annote dans la marge Samuel Minne. Le portfolio tout en couleur de « John Bauer : Au-delà des trolls, esquisse de l’artiste », commenté par Christine Luce, ambitionne de dresser le portrait du peintre disparu en pleine ascension esthétique, avec photographies d’époque et reproductions soignées de plus de douze œuvres.

Fiction, l’imaginaire radical n’aurait pas la saveur souhaitée sans l’image. D’abord celle extraordinaire de Jef Benech’, lequel nous régale les yeux sur la couverture désormais augmentée de rabats. Brian Merrant nous rejoint, enthousiaste, et séduit par les kaijū de « Dorsale », il offre au magazine sa vision picturale de la nouvelle. Les collages de Line Claire tous inspirés par la lecture des textes s’ingénient à en extraire l’émotion qu’ils procurent. Francis Saint-Martin, quant à lui, soutient la revue entière grâce au précieux humour old school de son dessin.

Fiction, c’est 128 pages, 35 000 mots, 220 000 signes soignés, illustrés, riches de découvertes et d’analyses pour notre littérature de l’imaginaire, accessibles dès 13,90 € le numéro, ou 41,70 € l’année de trois numéros. C’est aussi et surtout un micro système culturel indépendant, original, porté par des passionnés auxquels on ajoutera la bienveillance bénévole du maquettiste et du logisticien des Moutons électriques, Mérédith et Roman Debaque.

Qu’ajouter pour vous convaincre, lectrice et lecteur, d’ajouter votre contribution ? Vous avez souhaité recevoir notre lettre d’informations, vous avez manifesté votre intérêt pour Fiction, souscrivez, parlez-en autour de vous, vous êtes notre seule ambassade. Le prozine a besoin de votre participation pour paraître.

À bientôt, Christine Luce